Classique du polar français, Mort d’un pourri de Georges Lautner, avec Alain Delon, est sorti en 1977. Un film comme son titre l’indique, et comme le scénario le confirme, qui parle de l’écosystème du monde politique et des affaires dans les années 1970. Force est de constater que les hommes d’influence n’en sortent pas grandis.
Mort d’un pourri – L’histoire
Pas question de vous révéler les dessous de l’intrigue, car j’ai horreur des spoilers, des bandes-annonces, et des journalistes qui racontent les films dans leurs critiques. Je vous indiquerai simplement comment Mort d’un pourri débute : un coup de sonnette chez Xav’ (Alain Delon) à quatre heures du matin. Son ami député, Philippe Dubaye (le toujours très bon Maurice Ronet), a de gros ennuis et il compte sur Xav’ pour l’aider.
Mort d’un pourri – Casting en or plaqué
Rien qu’à lire tous ces noms, on est pris d’un certain frisson : Alain Delon, Ornella Mutti, Stéphane Audran, Maurice Ronet, Julien Guiomar, Mireille Darc, Jean Bouisse, Daniel Ceccaldi, Klaus Kinski… Ce n’est pas la distribution d’un vaudeville de Feydeau à la salle des fêtes de Palavas-les-Flots ! Je précise que je n’ai rien contre cette salle des fêtes. Je ne sais même pas si elle existe. En première ligne, Alain Delon est excellent dans son rôle de justicier sans illusions, prêt à tout pour venger son ami.
Tous ces grands acteurs jouent donc leur partition de façon impeccable sous la baguette du maestro Georges Lautner, plus connu pour être un réalisateur de comédies policières (Les Tontons Flingueurs, Ne nous fâchons pas…) que de films noirs, même si Le Pacha (1968) avec Gabin proposait déjà son lot d’amertume. Mais le meilleur chef d’orchestre ne serait rien sans la plume du génial Michel Audiard, qui signe là un de ses meilleurs scénarios (le film est l’adaptation d’un bouquin de Raf Vallet).

Mort d’un pourri – Une écriture au cordeau
La grande force de Mort d’un pourri, c’est que derrière cette histoire de magouille politique, il y a un génie du dialogue, de la sentence verbale, de la repartie sanglante, de l’aphorisme cruel, du constat drolatique… J’ai nommé Michel Audiard. Mort d’un pourri est son 95ème film auquel il participe en tant que dialoguiste ou scénariste. Mais c’est surtout un film qui survient deux ans après la mort tragique de son fils dans un accident de la route. “Un certain temps déjà que je ne joue plus… à rien… depuis qu’une auto jaune a percuté une pile de pont sur l’autoroute du Sud et qu’un petit garçon est mort. C’était par une matinée de grand vent. Voilà.” (La nuit et toutes les autres nuits, Michel Audiard) Son écriture, ses dialogues vont devenir sombres, désenchantés, sans espérance vis-à-vis de l’homme.
Mort d’un pourri – Un polar désabusé
Mort d’un pourri n’est pas un film à voir quand on croit sincèrement au meilleur des mondes servi par les élus du peuple. C’est un diamant noir où les personnages, des nantis, des arrivistes, évoluent dans un marécage de coups tordus sans se soucier aucunement des petites gens dont ils ont la responsabilité. Le film est le portrait en vase clos d’une élite déconnectée, qui veut avoir leur place au soleil en écrasant le voisin. Et pour cela tous les coups sont permis.
Mort d’un pourri – Considérations de fin
La mélancolie et l’acédie transparaissent à chaque plan de Mort d’un pourri. Pas un seul individu n’y échappe. La magnifique musique de Philippe Sarde, avec ses nimbes de violon, ses arpèges au piano et le son profond et triste du saxophone de Stan Getz, imbibe le film d’une ambiance grise et froide. Mort d’un pourri est un film essentiel, un des meilleurs polars politiques français. Ne pas désirer le voir est un crime.
Pour finir laissons à Edouard Herriot, figure de la IIIème République, le soin de conclure tout en vous disant à la semaine prochaine : “La politique c’est comme l’andouillette. Ça doit sentir la merde mais pas trop”. Vaste programme…
Mort d’un pourri (1977) de Georges Lautner avec Alain Delon, Stéphane Audran, Maurice Ronet, Daniel Ceccaldi, Michel Aumont, Julien Guiomar, Jean Bouisse…
Pour ceux qui aiment les bandes-annonces :
