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L’Ultime razzia (1956) – Critique

Braquage Ultime razzia

L’Ultime razzia – Point de départ

Le générique débute. Des chevaux sellés pour une course sortent des box. On les voit ensuite, montés par leurs jockeys, emmenés vers la piste tandis qu’une musique martiale d’un style « péplum » retentit. Les boîtes de départ sont tirées par des chevaux de trait. Les chevaux rentrent dans celles-ci. Le départ est donné. Le public retient son souffle. Mais un homme, Marvin Unger de son nom (c’est une voix off qui nous le dit) n’en a rien à faire de cette course et de cette frénésie. Il a parié, selon une tactique débile, sur tous les chevaux. Cependant, il se fiche du gain, ce qui l’importe c’est de transmettre des messages. Dans quel but ? Pour un coup de deux millions de dollars…

The Killing affiche

L’Ultime razzia – Critique

Troisième long-métrage de Stanley Kubrick après Fear and Desire (1953) et Le Baiser du tueur (1955), L’Ultime razzia (The Killing en VO) sera le film qui lancera sa carrière dans une trajectoire que l’on connaît. Trajectoire qui le placera comme l’un des réalisateurs les plus importants du XXème siècle, suscitant son lot d’adorateurs et de pourfendeurs. François Bégaudeau, critique cinéma et littéraire entre autres dont les analyses sont souvent très intéressantes même si personnellement sa grille de lecture marxiste n’est pas en phase avec mes idées, laisse entendre que le cinéma peut se diviser entre kubrickiens et non-kubrickiens. Le cinéma de Kubrick serait une projection fantasmée d’un réel purement intime alors que le cinéma non-kubrickien tel que le défend Bégaudeau serait un cinéma plongeant dans le réel dans sa définition stricto sensu pour en saisir la crue vérité. Éternel antagonisme, qui ne se cantonne pas qu’au cinéma mais à tous les arts : doit-on s’évader dans une vérité autre ou essayer de comprendre celle qui nous entoure ? Bien évidemment, l’article présent n’a pas pour but de répondre à cette question dont les éléments de réponses mériteraient des thèses et des thèses sans que nulle sentence définitive ne vienne à clore la réflexion. Mais il est important d’avoir à l’esprit que la filmographie de Kubrick est une représentation particulière du cinéma. Comme nous le voyons dans L’Ultime razzia.

Ultime razzia film

Attardons-nous maintenant sur le film en question, et voyons quelles émotions nous procure-t-il, pour ensuite tenter d’en comprendre les raisons. Le premier mot qui vient à l’esprit à la fin du visionnage de ce film noir est « maîtrise ». Kubrick, alors âgé de 26 ans, maîtrise déjà parfaitement son sujet dans le fond et dans la forme – la forme prenant le pas sur le fond, mais nous le verrons un peu plus tard – Que cela soit dans le montage ou dans la composition des plans, nous nous trouvons devant un objet cinématographique de très grande qualité. Le film joue sur plusieurs temporalités dans la préparation du braquage notamment. Le spectateur ne s’y perd pas une fois, et tout est limpide et équilibré. Et la jouissance du film de braquage qui réside dans la préparation minutieuse qui prépare un tel évènement est absolument présente. De ce côté-là, c’est une réussite implacable.

Ultime razzia

Toutefois, on retrouve déjà dans le cadrage, la volonté inexpugnable de Kubrick de composer des tableaux. Lui l’ancien photographe aimait cette manière de filmer. Non pas finalement de façon dynamique (avec le risque de déséquilibre) mais par une suite de plans presque statiques (très beaux au demeurant). Bien évidemment, il y a du dynamisme dans la filmographie de Kubrick, mais c’est un dynamisme contenu, corseté. On est toujours dans la maîtrise, mais une maîtrise jusqu’au-boutiste. Et cette impression perdure jusqu’à la fin du film. Ainsi, lorsque je sous-entends que la forme prend le pas sur le fond, c’est qu’on a le sentiment que l’histoire que Kubrick veut nous raconter lui importe assez peu. Les personnages sont des archétypes qui ont du mal à prendre de l’épaisseur. Comme si Kubrick en voulant réaliser un film noir avait coché toutes les cases du genre : le gangster écrasé par le poids du destin, la femme fatale, le mari faible et lâche, le jeune loup… sans se soucier de véritablement prendre à bras-le-corps ces figures en les confrontant au réel.

L’Ultime razzia n’est finalement qu’un brillant exercice de style, qui happe le spectateur, servi par des images fortes plus que des scènes (le final dans l’appartement est d’ailleurs révélateur de cette tendance de Kubrick à photographier plus qu’à filmer). Nonobstant, je vous en recommande fortement le visionnage car malgré mes réserves sur les personnages et l’histoire qui restent dans les clous très normés d’un film noir classique pour ne pas dire cliché, la maestria de Kubrick en fait un objet cinématographique très intéressant.

L’Ultime razzia (1956) de Stanleey Kubrick avec Sterling Hayden, Coleen Gray, Vince Edwards, Jay C. Flippen, Elisha Cook Jr., Marie Windsor…

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